Catégorie: Au Boulot!

Résister [v.tr.ind.] I (Valeur passive). 1° (Choses) Ne pas céder, ne pas s'altérer sous l'effet de. 2° (Etres vivants) Ne pas etre détruit, altéré (par ce qui menace l'organisme). V. Supporter. - Supporter sans faiblir (ce qui est moralement pénible). 3° (Choses abstraites). Se maintenir, survivre. II (Valeur active). 1° Faire effort contre l'usage de la force. V. Débattre (se). - S'opposer (à une attaque armée). V. Défendre (se). 2° S'opposer (à ce qui contrarie les désirs, menace la liberté). V. Lutter (contre). V. Révolter (se).

Défendre [v. tr.] I. 1° Protéger quelqu'un ou quelque chose contre une attaque en se battant. 2° Soutenir quelqu'un contre les accusations, les attaques. V. Plaider (pour). 3° (Choses) Protéger contre les attaques. V. Garantir, préserver.

Utopie [n.f.] 1° Idéal, vue politique ou sociale qui ne tient pas compte de la réalité. 2° Conception ou projet qui paraît irréalisable.

Devoir [n.m.] 1° Obligation morale générale. 2° Ce que l'on doit faire, défini par le systéme moral que l'on accepte, par la loi, les convenances, les circonstances. V. Charge, obligation, responsabilité, tâche.

Juste [adj et n.m.] I (V. Justice). 1° Qui se comporte, agit conformément à la justice, à l'équité. V. Equitable. Sans parti pris. V. Honnête.

Croire [v.] I. V. tr. dir. 1° Penser (que quelque chose) est véritable, donner une adhésion de principe à. V. Accepter, admettre, penser. 2° Considérer comme vraissemblable ou probable (sans être sûr) V. Estimer, juger, penser. II. V. tr. ind. (à, en) 1° Tenir pour réel, vraissemblable ou possible. 2° Etre persuadé de l'exitence de la valeur de (tel dogme, tel être religieux).

Je continuerai à résister même si je défends une utopie, peu importe.

Parce qu'il est de mon devoir d'être juste.

Parce que j'y crois.

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Envie de démissioner. Envie de tout envoyer chier. Envie de claquer les gamins. Ce ne sont que des barbares en devenir. Ils gueulent, ils insultent, ils frappent, ils sont méchants, gratuitement, ils comprennent rien et ils s'en foutent, pourvu que ça cogne et que ça crache pour leur gueule. Envie de claquer le ministre, et tous ces crétins qui réfléchissent et parlent, à cent mille années lumière du terrain. L'impression que tout le monde s'en fout, et que de toute façon on va droit dans le mur. Que la justice et l'égalité c'est des conneries. Et personne a les couilles de le dire, et de l'assumer bordel. Alors on fait semblant.

L'observation réfléchie de la langue c'est des conneries, moi j'ai des gamins quasi illétrés en CM2. Incapables de faire leurs exercices tous seuls. Qui passent leur temps à se lever, à répondre, à rire bêtement, et à rien faire. A se prendre de gueule. Sans fin. Et rien n'y fait. Mal élevés, pas élevés.

Et je suis pas formée pour assumer un triple niveau, je suis pas formée pour avoir une classe de gamins en grande difficulté. Seulement officiellement c'est pas une classe d'enfants difficiles. Et on m'explique que le réseau d'aide est plutôt axé pour les CP/CE1. Mascarade. Autant pêter dans un violon pour essayer de faire de la musique.

J'me sens seule, et j'ai l'impression qu'on prend vraiment les enseignants pour des cons. Parce que là je dois choisir mes heures de formations obligatoires, et tout ce qu'on me propose c'est "l'outil informatique pour la direction"... 3 heures pour apprendre à se servir d'un email. Ou encore des trucs sur les projets scientifiques... Quel tas de conneries. Tout ça c'est pour les élèves idéaux qui n'existent pas. Pas chez moi. Moi j'aurai besoin d'une formation "comment faire passer en 6° un enfant qui ne sait pas lire". Une formation sur comment on peut faire pour corriger ce genre de dictée, chez un enfant de CM1...

... les ssoiso gouché acoter du lion. lento apré an ze promonen le lion voi le bore delo...

"... Les oiseaux couchaient à côté du lion. Longtemps après en se promenant, le lion voit le bord de l'eau..."

L'académie se fout de notre gueule, le ministère se fout de notre gueule. Je pensais pas faire grève le 28 septembre parce que question thunes je suis juste, mais franchement je me demande. On nous prend pour des cons, juste bons à broyer dans la machine. Les gamins nous prennent pour des cons, juste bons à les faire chier et à faire chier leurs parents.

Bordel mais après tout hein, qu'est-ce que j'en ai à foutre que leur mômes sachent lire moi? J'men carre. Mon cul il est au chaud et pour longtemps. Tant pis pour eux s'ils veulent pas comprendre. Et j'emmerde l'éducation nationale et tous les pseudo moderno-intello-pédagogues. Leurs méthodes à la con, c'est juste pour les futurs élénistes. Les autres ils vont droit dans le mur. Et ils y vont en gueulant.

Pauvres cons.

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Aller quelques nouvelles quand même, même si je suis naze et que je ne pense qu'à aller dormir, je vous dois bien ça, des fois qu'il y en aurait pour penser que ça y est, ben oui, c'est arrivé, les gamins l'ont mangé. Non non et non, je l'ai déjà dit, les enfants ne sont pas carnivores.

Donc ma rentrée c'est trèèèèèès bien passée!! Je vais même être dans le journal!!! Je deviens une figure locale... même pas besoin de faire la star'ac! Le maire, qui se bat beaucoup pour sa commune et qui est très content de l'ouverture de la deuxième classe, avait convié deux journalistes à venir couvrir l'évènement. Pose avec mes collègues et le maire, petite interview, pour une entrée en carrière quoi rêver de mieux!!!! Les articles ne sont pas encore paru, je guette... Bêtement j'ai un peu peur d'avoir une tronche de cake sur les photos, parce que j'ai toujours une tronche de cake sur les photos mais franchement pour une fois peu importe... ça me fera un super souvenir!!!

Je crois que je réalise pas encore ce qui s'est passé, et dans quoi je suis. Enfin même si je me sens comme un poisson dans l'eau! Mes élèves sont sympas pour le moment et mon système de punition à l'air de fonctionner. J'essai de manier le bâton et la carotte dans une ambiance de confiance, pas toujours facile, c'est comme être un équilibriste en permance sur son fil. Faire gaffe à ce qu'aucun gamin ne déccroche, qu'aucun ne soit exclu. Les gronder mais pas les dégoûter... Pfffff épuisant! Je rentre le soir à huit heure, à peine le temps de promener un peu Touille et je dois m'y remettre, faire le courrier, faire les papiers, regarder un peu les premiers travails des enfants... régler des problèmes de directrice aussi. J'ai déjà du quasiment virer - elle a démissioné en fait - la personne embauchée pour surveiller la cantine. Parce qu'il m'a fallu pratiquement une heure pour calmer les gamins vendredi après midi après qu'elle les ait plus ou moins insulté et qu'elle en ait malmené certains qui voulait venir m'avertir. Du délire!!! Ils sont pas faciles je reconnais mais avec mes collègues ont s'en sort super bien aux récrés, la cantinière aussi arrive à les tenir -depuis 17 ans imaginez! - alors j'ai pas compris pourquoi avec cette personne ça avait littéralement dégénéré! Du coup le soir obligé de chopper les mamans des gamins malmenés pour leur dire que le soucis était réglé, histoire qu'elles soient pas devant la porte de mon bureau lundi à l'aube!

Evidemment c'est pas de tout repos hein! Mais c'était prévu comme ça. Je passe la photocpieuse qui se bloque deux fois par jour, les moments où je gueule comme une tarée pour qu'ils la ferment un peu... ouais parce que forcément quand tu distribues les fournitures c'est comme si c'était Noöl, ils veulent tous un cahier jaune, ou non un bleu, ah non un rouge ... et personne n'écoute plus quand tu expliques comment on marque son nom sur le cahier. Les chamailleries à la récré, les pétages de plombs de certains, le niveau malhureusement excécrable de tous... Là je m'inquiète vraiment pour eux à vrai dire. Surtout pour mes CM2 qui vont devoir rentrer en 6°... le niveau est absolument navrant, voir consternant. Ces gamins ont été abandonné à eux même depuis des années. Sans parler bien sûr du niveau social, la moitié des parents de ma classe vont chercher des colis de nourriture à la mairie. Certains mômes ne mangent qu'une fois par jour, à la cantine. Je dois même appeler le CMS lundi (centre médico-social) pour le cas d'un gamin qui a des soucis à la maison... Pour faire du bon boulot là dedans, faut en vouloir. J'espère que j'aurai la force de me battre jusqu'au bout de l'année pour tout ce petit monde. Et de remettre ça tous les ans.

Mais bon. Tout ça n'est rien. Parce qu'il a tellement de petits détails absolument divins. Les récréations ensoleillées où les gamins vont cueillir du raisin et des figues derrière pour nous les ramener, le thé du matin et celui de midi apporté gentillement par la cantinère, posé dans mon mug sur le bord de mon immense bureau. Le repas de midi qu'elle nous sert avec amour, après nous avoir demandé le matin ce qu'on voulait manger. Dire bonjour sur le chemin de l'école en croisant le catonier ou un des conseillers municipaux. Serrer la main au maire et voir le bonheur de cet homme qui pourrait être mon grand-père. Les parents contents qui à peine deux jours après la rentrée vous demandent déjà, anxieux, si vous vous allez rester l'année prochaine. Et quand je leur dis que certainement que oui, lire la gratitude sur leurs visages... Idem avec l'inspectrice qui est passé voir si tout allait bien et qui en apprenant que je comptais rester à pousser -véridic- un soupir de soulagement en me disant que vraiment vraiment vraiment ça serait bien parce qu'elle ne compte plus le nombre de rentrée désespérante faite dans cette école... Les ah et les oh des gamins quand j'annonce un peu tout ce qu'on va faire cette année... Aaaaaah pour le cahier de dessin, ooooooooooooh pour l'animal de campagnie, aaaaaaaaah pour le coin lecture, oooooooooooooh pour l'écriture libre, aaaaaaaaaaaaah pour les jeux dans la cours, oooooooooooooh pour le point écoute dans la classe... Et les yeux surtout, leurs yeux pétillants et malins, les voir briller toute la journée. Le mot sur le coin de mon bureau vendredi soir, qui disait "maîtresse vous êtes super sympa". Les entendre rire à mes blagues. Les voir faire des efforts, réfléchir, avoir envie. les enfants ont toujurs envie. Sans parler du bonheur d'avoir mon royaume, ma classe d'abord. Ma classe. Et puis mon bureau de directrice, mon école. Je suis chez moi. Pour un an. Pour la vie peut être, c'est elle qui le dira.

Je ne bois que du cidre depuis hier soir, histoire de fêter mon bonheur, mon appart ressemble à un shaker géant, j'ai reçu plein de manuels scolaires que je dois encore feuilleter, j'ai des papiers super importants pour l'académie qui attendent... Mais je suis tellement naze que j'en suis zen. Rien n'arrive à m'énerver. Rien ne peut m'atteindre. Je suis invicible.

Je suis grande.

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Ici rien n'est prêt. Journée de prérentrée hier avec le premier conseil des maîtres, interminable, où il a fallu ingurgiter toutes les informations que ma collègue de maternelle - désormais bâptisée Piverte - nous a balancées à pleine pelletés. J'en pouvais plus. Rangé quelques bricoles dans l'urgence, tenté despéremment de faire que mon bureau de directrice ressemble à un bureau de directrice. Pas gagné. Tenté aussi de définir les missions de Loupiote, notre emploi de vie scolaire. Elle est là pour nous aider et nous faciliter la vie, seulement personne ne sait comment elle doit faire! Alors on va aviser. La pauvre elle vient bosser tous les jours en ne sachant absolument ce qu'elle fera dans la journée, et la plupart du temps d'ailleurs elle ne faisait pas grand chose. Abérant certes, mais vrai. Elle est totalement paumée, volontaire pourtant, elle veut bien faire mais se retrouve dans l'attente perpétuelle. Il va donc falloir y remédier.

Les dossiers de rentrée ne sont absolument pas prêts. Je courre après des papiers que je savais même pas qu'ils existaient. J'ai des registres même pas tenus, et mon cahier d'appel toujours pas rempli. Un journaliste viendra faire un papier sur l'ouverture de la nouvelle classe, et je ne sais même pas ce que je vais dire aux parents pour mon speach de rentrée. Aucune photocopie de faite, je vais devoir m'y coller demain matin en urgence. Mes exos de maths ne sont qu'un brouillon informe, et l'activité sportive de l'après midi n'est même pas encore une ébauche d'idée dans ma tête. Mon emploi du temps est plus qu'approximatif. Sans parler des millions de détails auxquels je n'ai pas pensé.

Le problème de la punition est réglé mais mes bureaux ne sont pas installés correctement, il faudra aussi que je fasse ça demain matin. J'espère qu'ils ont enfin installé mon bureau de maîtresse au moins, parce qu'ils devaient me le changer. J'ai mis des plantes vertes partout, c'est plus vivant. Ca manque de posters par contre. Faut que j'affiche mes horaires de réception des parents. Et je n'ai toujours pas les clefs de l'école.

J'ai encore des commandes à faire. Faut aussi que je choisisse ma tenue pour demain. La tenue de la maîtresse. J'ai déjà les chaussures. Faudra que j'arrive tôt pour pouvoir me changer. Il parait qu'il doit faire beau. Je dois amener aussi mon thé aux agrumes et mon pôt de miel. Et mon mug, forcément. Il faudra que je m'achète des ballerines pour la classe histoire de pas avoir trop mal aux pieds. Et que je pense à couper mon portable. Y'a aussi le courrier de la semaine que j'ai pas lu...

Sinon tout va bien, je suis sur un nuage. Un nuage psychédélique. C'est comme de préparer sa valise pour un super voyage. J'ai l'impression d'une course échevelée dans les couloirs de l'aéroport, quand on arrive à l'embarcation mort de rire et à bout de souffle...

Je pars pour ma première rentrée.

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Journée de folie aujourd'hui. Journée passée à l'école, à continuer de ranger, classer, trier, compter, faire la poussière, poncer, repeindre aussi... je suis multitâches. J'ai rencontré une nouvelle collègue, celle qui va se charger de la maternelle de notre RPI - en zone rural les écoles se serrent les coudes en se regroupant - et donc mon école fonctionne avec l'école maternelle d'un des villages alentours.

La fille en question a déjà deux ans d'ancienneté, autant dire une éternité hein, elle connait les rouages, les gens, ça fait rêver. Elle est novice pour la direction mais d'emblée elle m'a dit qu'on allait faire les trucs ensemble, surtout pour la rentrée avec toutes les galères qu'il va falloir écumer. Ce qui m'angoisse le plus c'est l'élection des parents d'élèves... ça va être du sport. Enfin bref, elle est super dynamique, très portée sur le travail de groupe, et pour ça, ça a l'air de bouger pas mal dans la circonscription. En zone rural, on se défonce. Et finalement ça donne pas mal envie.

Elle a même réussi a coller la gestion de la coopérative à Cleopatra. Une bonne chose de faite je peux vous dire. Moi qui tournait autour du pot, elle y est allée franco sans prendre de pincette, pour un peu j'étais presque gênée... Non en fait j'étais pas gênée. Elle a fait ça tellement naturellement, sans chichi. parce que le moins qu'on puisse dire c'est que c'est pas une chichiteuse. Elle a un look qui tue, entre la matheuse binoclarde et la grenouille de bénitier, mais ne doute de rien et trace tout droit, tout simplement. C'est pas le genre grande gueule, pas du tout, juste le genre efficace. Super efficace.

Du coup elle a finit de me remonter à bloc. Déjà que ça allait bien mieux, grâce à la journée passé chez mes parents mercredi, là je suis à fond ce soir. J'ai compris que plutôt de tourner autour du truc en me disant "oh mon dieu c'est énorme oh mon dieu c'est énrome oh mon dieu..." je ferais mieux d'arrêter de brailler et de m'y mettre. Et oui. Fini les vacances, faut que j'arrête de tirer au flanc, et que j'accepte le fait que oui je suis directrice, première année d'enseignement, et que forcément ça veut dire beaucoup de travail. Pas grave. J'ai mes mercredis, mes weekend, et des vacances dans deux mois. Va falloir taffer sérieux d'ici là, c'est tout. Et arrêter de vouloir que tout soit parfait. L'important c'est que ça aille!

Alors je vais prendre les choses les unes après les autres, et les faire les unes après les autres. Petit à petit le métier vient. Aujourd'hui je me suis même entendu dire à Cléopatra "non mais ne t'inquiètes pas pour ça, c'est mon rôle je m'en occupe". Si c'est pas merveilleux ça? Du coup ça eut l'effet très appréciable de la détendre, et j'ai eu l'impression que l'entente entre nous cet aprem était plus honnête, un peu moins la comédie quoi. La venu de notre nouvelle collègue n'y était pas pour rien je le sais aussi.

Bref, tout ceci s'annonce très bien finalement. Je ne fais pas d'illusion va y'avoir des moments difficiles, normal. Mais je n'ai plus de doute quand au fait d'avoir bien agit en prenant cette direction. je me sens à la hauteur. Novice peut être mais à la hauteur.

Tiens j'entend le Capitaine qui hurle.

- Raaaaaah vous faîtes bien de parler de hauteur Mousaillon!

- Euh c'est pas moi Capitaine...

- Comment ça pas vous Mousaillon? Il n'y a que vous et moi sur ce bateau parbleu! Vous allez me dire que j'entends des voix peut être?...

- J'ai rien dit Capitaine.

- Oh que si vous avez dit quelque chose, justement!

- Euh Capitaine?...

- Oui Mousaillon?

- Y'a l'Archi sur le pont.

- Bien vu Mousaillon! C'est exactement de ça que je vous parle depuis tout à l'heure!

- Vraiment?

- Absolument!

- Euh Capitaine?...

- Quoi Mousaillon?

- L'Archi grimpe sur la planche là.

- Parbleu Mousaillon vous êtes diablement observateur aujourd'hui!

- Il va sauter Capitaine.

- Vous croyez?

- Je crois.

- Raaaaaaa c'est pas ce qui était prévu ça Mousaillon!

- Parce que y'avait quelque chose de prévu?

- Oui un superbe bal masqué avec des majorettes et des castors.

- ?...

- Humour de Capitaine.

- Aaaaaah bon.

- Vous feriez mieux de rire maintenant Mousaillon.

- Je suis mort de rire Capitaine.

- Vous allez être mort tout court Mousaillon. Vraiment court.

- En attendant Capitaine, c'est L'archi qui va mourir là.

- Ah celui là, mais qu'est-ce qu'il a hein? Demandez donc! Qu'il prenne l'air d'accord, pour une fois qu'il sort de sa cabine et qu'il prend un peu de hauteur. Je suis d'accord. Même la planche, il a raison c'est une belle promenade! Mais de là à aller jusqu'au bout... il va me bouchonner mes requins! Des requins élévés uniquement à la fesse de mousaillon, des bêtes magnifiques! Alors Mousaillon, une explication!

- Il dit que personne ne l'aime, que personne n'apprécie son travail à sa juste valeur, et qu'il est bon à rien.

- Par toutes les plumes de mon chapeau Mousaillon! Qui est responsable de cette débacle?

- Pas moi Capitaine.

Aie. Je crois bien que c'est moi. Totalement oublié l'Archi moi. Des fois dans la vie, tout se passe bien, bien trop vite, et on oublie de dire merci. Oups. Il a déjà sauté?

- Pffffff.... Pensez bien que non! Que diable Mousaillon allez le chercher!

Dire que j'ai menacé ce pauvre Archi en chef de l'envoyer au galère s'il redressait pas un peu ma vie. Bon ok, il l'avait cherché hein, c'était vraiment le bordel. Son plan était pas conforme et j'ai atteri à des kilomètres de la cible, une vraie catastrophe. Tout foutait le camp dans tous les sens, et lui il arrivait à rien. Alors oui j'ai sévi, oui je me suis fâchée. J'ai haussé le ton, non en fait j'ai gueulé comme une tarée, et j'ai menacé aussi. Résultat: ma vie tourne comme du papier à musique. La ligne est arquée juste comme il faut, le bon angle, la bonne direction, ajustée parfaitement. Le plan de l'Archi était impécable sur ce coup là. Et j'atteri exactement là où je dois.

Ok l'Archi en chef, saute pas tout de suite, il se pourrait que j'ai encore besoin de quelques plans pour la suite. Ton contrat, je le reconduis, pas de soucis. Et pour un peu, ouais pour un peu, quand même, je t'aime bien. Super boulot. Continue comme ça.

- Et bien voilà, il est reparti dans sa cabine, nous ne le reverrons plus avant des mois!

- Il va vous manquer Capitaine?

- Diable non! Pas besoin d'un Archi pour barrer ce navire!

- Ouais mais pour savoir où on va, c'est mieux quand même...

- Qui a dit que nous savions où nous allons Mousaillon?

- Pas moi Capitaine.

- Je préfère ça.

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Oui je veux être directrice sauf qu'après seulement une demi-journée passée en présence de Cléopatra pour un grand rangement de rentrée j'ai failli finir en larme dans la remise tellement je me sens pas à la hauteur.

Aurais-je la folie des grandeur?

Je déteste quand elle va parler au maire et que moi j'arrive quand il s'en va, je déteste ses jeans Levis impécables quand mon jean à moi est foutu mais que je peux pas m'en acheter un neuf, je déteste quand elle me dit "ah si moi j'ai commandé ça" et quand elle jette des trucs qui peuvent encore servir quand moi je me suis pris la tête à faire douze commandes différentes pour avoir les prix les plus bas et que du coup j'ai pas commandé la moitié de ce qu'elle s'est pas gênée pour commander et que je râcle les fonds de tiroirs pour rien parce que oui ça on pourrait jeter ça ferai vraiment de la place. Je déteste quand son copain -très gentil hein- nous aide à bouger les meubles lourds parce que moi j'ai pas de copain, quand elle parle aux parents d'élèves parce que moi j'ai la tête dans l'armoire et que je fais semblant de compter des pochettes transparentes. Je déteste quand elle sort un truc super alors que j'avais à peine commencé à y réfléchir.

Le problème c'est que cette fille est super. Et c'est moi qui psychote sur des détails à la con. Elle au moins elle se prend pas la tête. Qu'est-ce qu'on s'en fout qu'elle cause au maire, qu'elle soit plus organisée que moi, et le reste. Ca m'empêche pas de faire mon truc, ou dumoins ça devrait pas m'empêcher. Au lieu de ça je focalise sur elle, elle devient la responsable de mon incapacité.

Je me déteste.

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Putain je vais péter un plomb avec cette direction moi! C'est du grand n'importe quoi! Non mais je suis sensée faire comment??? Personne nous a rien expliqué à ce sujet, et pour savoir y'a pas d'autre moyen que d'avoir fait... j'vous jure c'est débile! C'est hyper compliqué, seulement y'a aucun cours, aucune formation rien. L'Education Nationale, niveau gestion du personnel c'est merdique.

C'est un peu comme si on choppait un gars au coin d'une rue pour l'envoyer réparer un 747 avec une clef à molette en lui disant seulement "vas-y!"... forcément va y'avoir un crash!

Comment je vais faire sans rire? On est à une semaine de la rentrée et je sais même pas par où commencer, je sais même pas ce que je suis sensée faire! Et le pire c'est que je sais même pas où chercher ni à qui demander!!!

C'est de la folie. Quelle chianlie!

Meeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeerde ça fait chier!

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Je viens d'avoir Cléopatra au téléphone et franchement elle est le genre de personne qui vous donne le sentiment de ne jamais être au bon endroit au bon moment.

Je suis aller à la mairie le... tiens je sais plus quel jour c'était. Enfin bon j'ai déposé mes commandes gnagnagna et moi j'ai eu droit à l'inventaire à faire et à la secrétaire de mairie bavarde. D'accord.

Cléopatra y est allé le lendemain. Sauf qu'elle, elle a le chic pour bien tomber. Parce qu'elle a eu une longue entrevue avec le maire, qui a en personne descendu sa commande avec elle et l'a approuvé. Elle a commandé plein de trucs auxquels j'ai même pas encore pensé, du genre un pluviomètre, et il a dit oui a tout. Même à la plastifieuse. Et puis elle a obtenu un tableau tout neuf hein. 

Ah et puis le détail qui tue. La secrétaire de mairie en question, la bavarde qui sait tout, est en réalité la femme du maire et remplace la vraie secrétaire pendant ses congés. Sauf que moi personne me dit rien. Et au pays de Candy dans les petites mairies de campagne ils ont deux secrétaires, c'est logique, y'a tellement à faire.

L'impression très étrange de passer à travers à peu près tout. Ou que tout me passe au travers, c'est selon.

Ah oui et Cléopatra m'a aussi annoncé de son ton le plus badin "ah ben non la réunion du 30 je viendrais pas, deux personnes pour représenter l'école ça va leur faire bizarre hein"... Flashback: il y a quelque semaine elle me disait que bien sûr elle allait m'épauler pour la direction gnagnagna et que les réunions on irait ensemble. Et moi déjà j'y croyais pas. Et là j'ai envie de dire: je te l'avais bien dit.

Sinon elle a décidé tout plein de choses et j'ai dit amen à tout, parce que tout était bien. Vraiment l'impression de rouler dans sa roue, c'est pénible. Elle fait tout pour elle, au mieux pour elle, au mieux pour sa classe. Et trouve super étrange mon histoire de vélo. Encore une pour qui je vais être quelqu'un de bizarre. Parce qu'elle en bonne fille de la campagne elle a passé son permis à 18 ans tellement tout le monde sait qu'à la campagne la voiture c'est vital.

Sauf qu'au pays de Candy on fait du vélo. Et on peut aller jusque sur la lune en vélo. Faites pas chier. Revisionez E.T.

Ah ben voilà, tout s'explique. En réalité je suis une alien. Avec un super pouvoir pour être totalement asynchro et n'avoir aucune consistance. Autrement dit je tiens du mollusque.

C'est flatteur pour l'égo ça tiens.

M'en fous parce que d'abord j'ai un vrai super pouvoir rien qu'à moi d'abord. Ouais. D'abord. Moi les gamins, ils m'adorent. Et ça c'est pas de la gnognote ça d'abord. Ouais. Je suis une sorte de X-men Bean quoi.

"Ma maîtresse d'abord elle vient de l'espace.

- Oh trop cool...

- Et même qu'elle connait E.T.

- Trop cool...

- Et qu'elle communique par télépathie avec les escargots.

- Trop trop cool...

- Et elle a un vélo jaune.

- ... Et alors?

- Ben c'est un vélo spatiale!

- Ah ouais trop cool..."

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Bon ça ne s'est pas passé comme Cédric - nouveau venu dans mes liens au passage - l'a imaginé, mais j'ai été à l'école, j'ai donné ma commande, j'ai parlé du portail et j'ai même eu en prime l'heureuse suprise de pouvoir faire le pointage de notre précedante commande justement livrée ce matin.

Vous savez quand on est gosse ce moment génial où on rentre à la maison avec les courses de fournitures pour la rentrée, et qu'on est tout excité de préparer son cartable avec sa paire de ciseaux, ses stylos, ses classeurs, et tout ça... Ben c'est un peu pareil mais en géant, avec 50 paires de ciseaux, des centaines de cahiers, des brosses pour tableaux, des aimants, des centaines de stylos, des protèges cahiers au kilomètre, des feutres en veux-tu en voilà, des cartons à dessin, des pinceaux, des équerres, des tailles crayons à pleine poigné, tout ça avec plein de couleurs, et en bonus un super joujou appelé rétro-projecteur, ça c'est pour les grands. Un truc de malade.

J'ai tout bien pointé et puis Cleopatra a appelé. Elle devait passer finalement elle est pas venue. Tu m'étonnes. Enfin. Elle m'a fait un topo sur le matos de sport qu'elle veut commander, m'a demandé mon aval à demi mot, et m'a ensuite tranquillement dit que pour le matos de sport que moi je veux ben je me démerde à faire ma commande de mon côté. Mais bien sûr. Faire une seule commande me paraissait plus simple mais non hein, elle fait son truc, je fais le mien. Pas de problème.

J'ai gardé les clefs, demain je retourne à l'école avec ma mère - et oui j'ai trouvé un chauffeur - pour déposer des trucs encombrants impossibles à embarquer en vélo - du matériel d'arts plastiques - et récupérer quelques bouquins histoire de commencer à préparer quelques cours. Quoi que quand même avec mon vélo j'ai réussi à aller chercher un four à la poste hein, mais c'est une autre histoire.

N'empêche à la mairie j'ai rencontré des gens qui m'ont souhaité la bienvenue dans la commune et ça ça fait plaisir. J'ai eu droit à quelques potins, du coup je comprends mieux certaines choses. Et ce moment passé dans la salle des archives à déballer et discuter m'a mise à l'aise, je prends chaque fois un peu plus mes marques. Sur le chemin du retour j'ai pas vu a route passer. Faut dire qu'elle est belle, et que j'avais la tête ailleurs...

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Là tout de suite faut que j'enfourche mon fidèle destrier - mon vélo oui va falloir que je lui trouve un surnom d'ici la rentrée - et que je pédale jusqu'à l'école pour fourrer une commande de 500 euros de bouquins sous le nez de la secrétaire de mairie. Arg. J'ai peur que ça passe pas, pas après les 2500 euros d'il y a trois semaines. Je sais pas pourquoi mais le fait de devoir faire approuver ma commande par le maire ça me fiche une panique... Et il faut aussi que je me plaigne des portails qui ne ferment pas et que c'est dangereux, et que je réclame le double des clefs, que je demande si les travaux seront fini à temps et comment je fais pour envoyer du courrier pour l'école.

Et là j'ai une boule au ventre. Comme une écolière.  Pffff... Tu parles d'une directrice toi. Pas capable d'assumer ses fonctions pour deux sous, envie de courir se cacher dans un trou comme une petite souris. De faire comme quand on est gamin et qu'on en a marre de jouer à faire semblant, qu'on en a marre d'avoir toujours le même rôle dans les jeux.

"Nan mais aller je veux plus faire la directrice môa!"

Trop tard. Fallait pas grandir.