Bombe Humaine
Catégorie: Dark Side
Imploser comme une bombe. Imploser. Mortelle. Assassine. Anéantir jusqu'au dernier, anéantir la terre, le temps, et qu'il ne reste rien qu'un chaos sourd et brûlé, qu'un cratère. Mon corps est comme du lait sanglant, s'écoulant à grand remous dans des récipients de plexiglass. Où sont la lave et la fonte qui me faisaient autrefois, les océans à perte de vue que je prenais quand la respiration me manquait? Il n'y a plus que des machines hurlantes, métal qui ravage mes horizons comme on creuse des tombes. Il n'y a plus que ce cri qui ne monte pas, le silence figé derrière la vitre, pendant qu'on me débite, et des envies de tout foutre en l'air. De tous les emmener avec moi, à grand renfort de poudre, que je puisse hurler vraiment, cette fois, hurler jusqu'à ce que je m'en fragmente. Où sont le feu et la chaleur qui m'ont menée jusque là, la foi, mes rêves? Il n'y a que leurs figures criardes dégueulant sur ma vie, et leurs rires j'ai envie de les trancher d'un côté jusqu'à l'autre. De voir leurs têtes rouler. Il n'y a que leurs exigences raides et aveugles, et des choix pointus pour s'empaller dessus. Et des mensonges, de cisaillantes ritournelles qui vrillent l'air ambiant de leurs odeurs d'acide. Mon âme est comme une chair rabotée et jetée, morceaux saignant qui s'en vont pourir, dans ces tranchées vaines que leurs machines borgnes ouvrent dans cette boue. Et leurs sourires, j'aimerais leurs en fendre d'éternels. En travers de la gorge, en travers du corps, définitifs et suintants, des sourires qui ouvrent en deux et font taire. Que je vois l'intérieur de ces monstres hurleurs qui découpent ma vie comme à l'abattoir, sans même que je puisse hurler du haut de mon crochet. Sans même que je puisse hurler ni me débattre. Dans cette désolation à perte de vue, le bruit asourdissant de la fatalité qui vous explose le coeur. Comme les carcasses qu'on broie, jetées par bac entier dans les mâchoires de fer qui laminent et qui crachent. Il n'y a que leurs dents et leurs couperets. Il n'y a que ces champs de bataille où je rampe, plein du fracas meurtrier de leurs rires. Et je voudrais imploser. Le visage dans ces tranchées sans fin. Sans même relever les yeux vers un ciel mort. Comme une bombe. Imploser. Dans un souffle brûlant balayant la terre. Soulevant mon coeur. Sauvant mon âme. Imploser comme une bombe. Mortelle. Pulvériser mon corps. Le leur. Et ne plus les entendre. Qu'il ne reste rien qu'un silence retombant. Mon hurlement.
Screm by Grzegorz Kmin