Catégorie: Dark Side
Rester debout. Même pas vivant. Juste debout. Pour tout le noir de la terre, pour tout le sang qui s'échappe. Rester debout. Pas vivant. Juste debout. Pour toute cette haine qui se contient dans sa gangue muette, forcenée décharnée aux vents des plaines suintantes. Pour toutes les luttes, vaines, malsaines, qui ne vomissent que plus de terreur et de frustration. Pour tout ce qu'on a volé, menti, torché. Pour tout ce qui manque. Rester debout. Même pas vivant juste debout. Pour tous ses hoquetements bouillonnants et cradingues, la pourriture à mes semelles, accrochée à mes doigts, les cordelettes de toutes les fautes qu'on expurges, qu'on expie, pour tout ce qui ne se dit pas et se plante, se saigne, se signe. Pour toute les heures qu'on effondre et qu'on effrite, comme les corps, comme les mots, égrennées comme les ossements des petits dieux sacrifiés aux autels des envies obsènnes. Rester debout. Même pas vivant. Et qu'aucune douleur ne puisse prendre place à l'endroit creux des tranchées ravinées dans ma chair, qu'aucunes plaintes ne puissent être entendues autres que le craquement froid des ruines d'une existence qui se décharne comme on pourrit en terre. Rester debout. Debout comme seule victoire, seule action honnête, valable, vaillante. Debout comme seule réponse, quand c'est tout ce qui reste dans le chaos verdatre et puant des eaux sillonantes et putrides s'échappant par les canaux de cités étrangères. Face au vide, à l'abyme, à l'absence, en de stupides et misérables comisérations, être contracté et contractant, jusqu'à se morceler et voir éclater le verre aux creux des paumes. Rester debout. Même pas vivant. Juste debout. A l'extrême confin de la réalité atroce et dévorante, observateur impuissant et absurde agonisant dans un silence policé. Quand explose les lumières des existences rapides jusqu'à eclabousser de couleurs et de feu ceux qui en meurrent de faim, être juste incapable de retenir le lien, de tisser l'attache, laisser glisser la sécurité et abandonner l'horreur en de vifs regrets effilés échardants. Et juste rester debout.
Abattoir by Unknown